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Albert Naud et l'Suvre inachevée : "je suis avocat, un métier formidable, je veux dire terrioant"
Il sait aussi se méoer
des plaidoiries qui font
plaisir à celui qui les
écoute : « méoez-vous
du violoncelle. Sa voix
est belle, mais son
ventre est creux »
bord d9une mort probable et apparemment
ignominieuse avait, d9emblée, mêlé sa personnalité à la mienne [18])». Au cours de
ce qu9il qualifiera de faux procès, tenu par
Paul Mongibeaux, président qui avait prêté
serment de fidélité au Maréchal Pétain, et
dont la préoccupation unique fut la rapidité,
toutes les règles de procédure pénale étant
violées [19], l9avocat refuse de cautionner la
comédie d9une justice soumise aux ordres
du pouvoir politique. Il demande dès lors à son Bâtonnier d9être relevé de sa
commission d9office. La défense s9abstient, expliquant que «)l 9honneur et le
prestige de notre Ordre nous interdisaient de nous associer à des débats qui
n9avaient de judiciaires que le nom [20])».
Albert Naud en tire un témoignage dans un ouvrage : pourquoi je n9ai pas
défendu Laval [21]. Il y décrit un désastre judiciaire. Celui à l9occasion duquel les droits de la défense ont été violés avec méthode et cynisme. Il y
fustige la médiocrité ambiante. Il vilipende une justice de classe : «)(&), la
bourgeoisie qui avait versé en silence et bien clandestinement des larmes
d9amour et de pitié sur les malheurs du vieux Maréchal, n9éprouvait aucun élan lorsqu9il s9agissait de Laval. L9allure un peu gouape de notre client,
ce mégot éternel qui charbonnait à sa lèvre, cette peau noiraude aux renets jaunâtres de Mongol, ce cheveu gras et indiscipliné, toute cette vulgarité de grand seigneur bohémien que dégageait sa personne, tout un
passé réputé trouble et plein de compromission, de
J9ai défendu Pierre marchandage et d9habilités faisait que Laval ne pouLaval, moi résistant& vait pas être l9homme de la bourgeoisie [22])». La conséje l9ai aussi aimé cration de la haine à laquelle il assiste le répugne : alors
que l9accusé a pris du cyanure, il n9est pas question de
comme on aime
le laisser mourir. La justice doit passer. Les médecins
un frère à l9instant de s9acharnent. Ils pratiquent un lavage d9estomac. Il est
la mort. Je l9ai envisagé de fusiller le traitre sur un brancard, appuyé
embrassé avant contre un poteau d9exécution. Laval se redresse : il est
exécuté, défiguré par le coup de grâce d9un sergent en
qu9il ne tombe sous
plein front : «)Pierre Laval)! ils ont voulu détruire ton
les balles, comme identité)», clame l9avocat, marqué à jamais. «)J9ai déj9aurais embrassé fendu Pierre Laval, moi résistant& je l9ai aussi aimé
mon frère a comme on aime un frère à l9instant de la mort. Je l9ai
embrassé avant qu9il ne tombe sous les balles, comme
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